L'image du Morne Brabant et de son époustouflante cascade sous-marine, due à une illusion d'optique, a…
Ratsitatane, un prince malgache exécuté à l’île Maurice
Ratsitatane té décapité le 15 avril 1822, Port-Louis, l’Ile Maurice. Mais kisa i connaît Ratsitatane ? Kisa té Ratsitatane ? Na point bon peu de monn i connaît ali, ici la Réunion. Et pourtant, Maurice, côté là-même, à peine 200 km, Ratsitatane st’in héros.
1817 : Radama 1er la interdit la traite zesclave
Madagascar là-bas, de moune i raconte son vrai nom té Ratsitantanina, li té in prince malgache. Son teint té clair, son cheveu té lisse et li navé inn ti barbe.
Li té mette in simbou, in l’espèce lamba, ec inn bordure bleu. Son papa té i appelle Andriamambavola. Li té minisse Radama 1er, le roi Madagascar.
Ratsitantanina té le neveu Radama 1er. Li la fait la guerre pou aide Radama agrandit son royaume. L’année 1817, Radama 1er la signe in traité ec l’Angleterre : li la interdit la traite bann zesclave, en échange l’Angleterre la donne ali in l’aide financier, technique ec militaire.
In poignard cachette dans son lamba
In an après-là, en 1818, premier zanglais l’arrivé. Té de missionnaire protestant. Quand li la vu toute ce bann zétranger débarqué, Ratsitantanina té pas trop d’accord. Li té méfiant. Li té marche toujours ec in poignard cachette dans son lamba.
Pou Radama 1er, li té commence ête génant. Na inn bann de monn la monte in complot conte li.
Le Gouverneur anglais l’ile Maurice té Sir Robert Farquhar. Li lavé envoye pou Radama 1er in conseiller té i appelle James Hastie. Ratsitatane té pas d’accord du tout ec le James Hastie, à cause té li l’auteur si l’armée Radama lavé perde deux-trois bataille conte bann Sakalava.
Radama la eu peur le peupe i révolte
De monn la dit comme-sa Ratsitatane la rode tué James Hastie, ec son poignard té cachette dans son lamba. Radama té furieux, li la fait arrête Ratsitatane, la fait enchaîne ali, la fait nir ali Tananarive pou tué ali.
Mais Ratsitatane té tellement populaire, Radama la eu peur le peupe i révolte. Alors li la dit James Hastie emmène Ratsitatane en exil l’île Maurice.
Le bateau l’arrive Maurice le 24 déssanm 1821. James Hastie la dit le chef le bagne Port-Louis, té i appelle Batisse, veille bien su Ratsitatane, à cause té in bougue dangereux.
Zesclave la monte là-haut dans la montagne
Normalement Ratsitatane té pou être transféré dans inn ote pays, l’île Rodrigues. Ratsitatane té connaît pas trop l’anglais, mais li la compris bonna té sar emmène ali dans in pays encore plus loin. Là-même li la décide sauvé, pou artourne dans son pays, Madagascar.
Na in dénommé Laizafe la aide ali chappé : dans la nuite 17 février 1822, Ratsitatane, ec inn trentaine zesclave malgache, la vole chemin. Mais Laizafe la trahi azot. En vérité Laizafe té in chasseur de noir marron, li té dann compagnie capitaine Orieux. Dès que bonna té fine chappé, Laizafe la parti dire son capitaine :
— Mon capitaine, Ratsitatane ec inn trentaine zesclave la évadé, zot la monte là-haut dans la montagne. Ratsitatane la dit comme-sa li sar fait la guerre bann blanc, li sar mette le feu dans la ville Port-Louis.
Ec la patte le bœuf, zot la fait in gri-gri
Quand le gouverneur Farquhar la connu le zaffaire, li la mette toute son l’armée en alerte. Zabitant de Port-Louis lavé peur, malgré zot té armé. Faut dire dans l’île Maurice, en 1822, navé 80.000 zesclave pou 20.000 blanc ec zomme libe.
La offe inn prime pou la capture bann noir marron. Mais la pas empêche inn dizaine zesclave malgache chappé, pou allé rejoinn Ratsitatane en l’air, dans la montagne.
Zot la vole in boeuf pou mangé. Ec la patte zot la fait in gri-gri pou fait tonm la foude su la ville Port-Louis. Na in zesclave marron la donne Ratsitatane son sabe en échange son simbou, son lamba.
Navé vingt-six malgache accusé
Gouverneur Farquhar la rassanm toute son l’armée, et li la donné l’orde attaqué. Quand Ratsitatane la vu bann soldat zanglais t’après monté toute côté su la montagne, pou ni trape ali, li la compris Laizafe lavé trahi azot.
Ratsitatane ec son bann camarade marron la essaye chappé, mais zot toute té arrêté. L’armette azot en prison, dann bagne Port-Louis.
Tout-de-suite après-là, le procès la commencé. Navé vingt-six malgache accusé. La nomme douze zavocat pou défann azot. Mais bann zavocat té pas fier, lavé désigne azot d’office. Zot té pas là ec sa : prann la défense in paquet de bandit ! Dans le zistoire, bann magistrat la quand même ni à-bout comprann toute-sa-là té la faute Laizafe : le chasseur de marron lavé aide bann malgache sauvé, pou li gaingne la prime. Li té accusé li aussi.
Smith la dit Ratsitatane i mérite pas la peine de mort
Procureur Général Portalis la demann la peine de mort pou douze zaccusé su vingt-six. La cour la condamne six bougue à mort : Ratsitatane, Laizafe, L’Eveillé, Latulipe, Nelson, ec Kotovolo.
14 avril 1822, Commissaire de Justice Smith la écrit Gouverneur Farquhar pou prann la défense Ratsitatane : à part témoignage Laizafe, navé point inn preuve comme quoi Ratsitatane noré dit li té sar fait la guerre bann blanc, li té sar mette le feu dans la ville Port-Louis.
Smith la dit Ratsitatane té i mérite pas la peine de mort, li la propose envoye le bougue en exil dans inn ote pays.
La empale la tête le trois cadave su in poteau
Lannmain 15 avril Gouverneur Farquhar la écrit inn lette Procureur Portalis pou demann ali quel té les trois plus coupabe dans la bann, sa que té mérite pas la grâce le roi. Portalis la réponn : Ratsitatane, Laizafe ec L’Eveillé. Fin-du-compte, Gouverneur Farquhar la pas suive du tout sa que Procureur Portalis lavé proposé : li la accorde la grâce royale pou trois bougue : Laizafe, L’Eveillé ec Nelson. Et li la fait inn nouvelle lisse condamné à mort : Ratsitatane, Latulipe ec Kotovolo.
Le jour là-même, 15 avril 1822, trois heure et demi de l’après-midi, Ratsitatane, Latulipe ec Kotovolo té décapité, devant bann condamné enchaîné deux par deux par le cou.
De moune i raconte le bourreau té obligé arcommence trois fois avann ni à- bout coupe la tête Ratsitatane. Après-là, la empale la tête le trois cadave su in poteau, pou mette en l’esposition en-bas la montagne.
Comme sa même lé mort Prince malgache Ratsitantanina, dit Ratsitatane.
Inn chanson en l’honneur Ratsitatane
Zordi pou bann Mauricien, Ratsitatane st’in héros. Zot i appelle ali combattant de la liberté. Port-Louis na inn rue i appelle rue le Prince Ratsitatane.
Sûrement zot i rappelle chanteur mauricien Kaya, lavé créé in groupe té i appelle Racinetatane. Li lé mort dans la prison, li navé 38 ans. Li té chante inn chanson en l’honneur Ratsitatane.
Ratsitatane lé mort en 1822. Treize an après-là, en 1835, l’esclavage té aboli l’Ile Maurice. Mais bann zesclave la Réunion navé encore treize an pou attann.
Jean-Claude Legros
Kaya : « Ratsitatane avait les armes. Moi, j’ai des mots »
«Ratsitatane avait les armes. Moi, j’ai des mots, j’ai la musique». Celui qui parle ainsi est considéré comme l’inventeur du seggae. Le Mauricien Kaya [en hommage à l’album de Bob Marley], de son nom Joseph Réginald Topize, est mort à 38 ans, dans les geôles mauriciennes, en 1999.
Au petit matin du dimanche 21 février, il est retrouvé au fond de sa cellule, baignant dans son sang, le crâne ouvert.
La tête contre les murs…
Quelques jours auparavant, il avait été arrêté pour avoir fumé de la marijuana sur scène, lors d’un concert organisé en faveur de la dépénalisation du cannabis.
Les circonstances de sa mort restent troubles : décès provoqué par une fracture du crâne selon les sources officielles qui affirment alors qu’il se serait blessé ainsi en se tapant la tête contre les murs parce qu’il était «en manque».
Une bande dessinée sanglante
Libération avait titré à l’époque : «Kaya mort, Maurice à vif». Lors de ce terrible épisode, l’île Maurice connaît de violentes émeutes : pillages, incendies, routes coupées, au moins cinq morts…
Percy Yip Tong, ami et producteur de Kaya, déclara le jour de son enterrement : «C’est le bal des hypocrites, une bande dessinée sanglante».
Une voix et un toucher de guitare magiques
Le Créole Kaya et son groupe «Racinetatane» prônaient une société dé-communalisée et cristallisaient un nouvel élan pour une conscience nationale mauricienne. Dans une île Maurice en proie aux tensions entre communautés, la popularité de Kaya et son engagement contre les inégalités sociales ont scellé son tragique destin.
Percy Yip Tong résume le talent de Kaya par ce souvenir, lors de la première rencontre : «Une pièce minuscule, dix rastas entassés, un son crade et des instruments pourris, mais quel rythme ! C’était nouveau, ça vous tapait dans les reins, et puis il y avait ce petit rasta à la voix et au toucher de guitare magiques…» [Source : jahmusic.net].
7 Lames la Mer
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L’Ombre de Ratsitatane VO from Jean-Noel Maurice on Vimeo.