Rencontre inattendue au cours d'une séance de jogging sur le bord de mer. Une meute de…
Vivian Maier, la femme qui faillit ne jamais exister
Le processus qui mène de l’ombre à la lumière s’est amorcé dès 2007 mais il ne parviendra jamais à mettre la main sur Vivian Maier vivante. Ce n’est qu’en 2009 que l’étrange destin de Vivian Maier se dénoue : on retrouve enfin sa trace mais elle vient de mourir, deux jours auparavant. Tout est en place pour que naisse une légende, celle de Vivian Maier, photographe de rue, dont l’oeuvre immense ne sera révélée qu’après sa mort.
Inconnue de son vivant, adulée dans la mort
Vivian Maier a bien failli ne jamais exister dans la mémoire collective et dans l’histoire de la photographie. Cette femme, inconnue de son vivant, a pourtant réalisé une oeuvre monumentale qui lui vaudra une belle place au panthéon des photographes.
Son nom désormais est une référence internationale et l’on ne manque pas, à chaque fois que l’on évoque ce parcours singulier, de citer d’autres femmes photographes : Tina Modotti, Germaine Krull, Cristina Garcia Rodero, Lisette Model, Sarah Moon, Bettina Rheims, Helen Levitt, etc.
Vivian Maier avait-elle sciemment concocté et entretenu son anonymat jusqu’à son dernier souffle ? Ou est-ce le manque de moyens et les circonstances qui l’avaient amenée à renoncer à la lumière sans jamais renoncer à la photographie ? Bien des questions resteront sans réponses dans cette histoire.
Une enveloppe oubliée avec un nom : Vivian Maier
En 2007, John Maloof, 25 ans, recherche des documents sur l’histoire d’un quartier de la ville de Chicago. Il fait alors l’acquisition pour 400 $ d’un fonds photographique mis aux enchères dans une salle des ventes. Le lot contient des épreuves photographiques, des négatifs et des diapositives [dont une grande partie non développée] ainsi que des films super 8.
John Maloof prend vite conscience de la qualité exceptionnelle de ce fonds photographique qui contient plus de 120.000 prises de vue mais ne parvient pas à en identifier l’auteur. Ce n’est qu’un an après l’acquisition qu’il tombe par hasard, au fond d’une boîte, sur une enveloppe oubliée avec un nom : Vivian Maier.
Vivian Maier est née le 1er février 1926, à New York, d’un père américain d’origine autrichienne, Charles Maier, et d’une mère française, Marie Jaussaud, elle-même photographe. Elle passe une partie de son enfance en France (notamment dans la vallée du Champsaur dans les Hautes-Alpes) avant de revenir à New York où elle travaille comme… nounou, puis à Chicago. Une sorte de Mary Poppins. Tout au long de sa vie, elle consacrera tout son temps libre à la photographie.
L’oeil rivé sur la misère humaine
Photographies de rue sans aucune complaisance, l’oeil rivé sur la misère humaine qui s’expose dans le théâtre de la ville. Images furtives ou plans rapprochés. Visages de la déchéance, visages de lumière… Reflets, ombres, silhouettes et jeux de miroirs. Peu à peu la personnalité de Vivian Maier se dessine, énigmatique quand même, discrète. Solitaire.
Comme pour signer l’ensemble de son oeuvre à la manière d’un Hitchcock, elle réalise un certain nombre de «selfies» mis en scène, où, la plupart du temps, elle apparaît au second plan, dans un reflet, un miroir. Est-ce une manière d’ajouter au mystère de sa vie ou de témoigner de sa réalité ?
De l’ombre de la vie à la lumière de la mort
John Maloof entreprend alors de sortir Vivian Maier de son anonymat. Un beau jour de 2009, il tape «Vivian Maier» sur google et lance la recherche. La toile lui livre un texte : une notice nécrologique car Vivian vient de mourir, deux jours auparavant, le 21 avril 2009.
«Vivian Maier, originaire de France et fière de l’être, résidente à Chicago depuis ces cinquante dernières années, est morte en paix lundi. Seconde mère de John, Lane et Matthew. Cet esprit libre apporta une touche de magie dans leur vie et dans celles de tous ceux qui l’ont connue. Toujours prête à donner un conseil, un avis ou à tendre une main secourable. Critique de film et photographe extraordinaire. Une personne vraiment unique, qui nous manquera énormément et dont nous nous souviendrons toujours de la longue et formidable vie».
John, Lane et Matthew Gensburg dont elle a été la nounou lui rendent ainsi hommage. Mais bientôt, grâce à l’action de John Maloof et d’un autre collectionneur du nom de Jeffrey Goldstein, l’oeuvre de Vivian Maier va enfin connaître la lumière et provoquer un véritable engouement qui ne s’est depuis pas démenti. Expositions, documentaires, films, articles, etc… Vivian Maier est passée de vie à trépas, de l’ombre de la vie à la lumière de la mort.
7 Lames la Mer
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